Animation d’ateliers d’écriture en structures d’accueil

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Mon premier groupe à la résidence autonomie de La Suze-sur-Sarthe (72)

En avril 2019, un nouveau projet a vu le jour : l’animation d’ateliers d’écriture en structures d’accueil. Compte tenu  de mon expérience passée, j’ai choisi de pratiquer cette activité auprès des personnes âgées hébergées en résidence autonomie et en EHPAD. Les objectifs essentiels de ces ateliers à visée préventive sont la stimulation cognitive et la socialisation.

L’entrée en établissement : une décision difficile

L’hébergement en structure d’accueil est une étape difficile à accepter. Elle suppose de faire le deuil de sa vie d’avant, de son logement, de son quartier. C’est le plus souvent une décision « par défaut », pour se rassurer ou pour sécuriser l’entourage.

La prise en charge des aspects matériels permet effectivement de ne plus penser aux contraintes quotidiennes, ce qui est un vrai plus. En collectivité, on peut aussi faire des rencontres, créer des liens. Mais ce n’est pas toujours le cas. Certains, pour différentes raisons, auront du mal à aller vers les autres.

Ce repli sur soi peut s’accompagner d’une diminution de l’expression et d’un appauvrissement du langage. À plus ou moins long terme, des conséquences sur les fonctions cognitives peuvent être observées.

Le volet prévention de la loi ASV

Un des objectifs de la loi ASV (Adaptation de la société au vieillissement), entrée en vigueur le 1er janvier 2016, est de soutenir la prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées.

Des financements départementaux encouragent des actions collectives adaptées aux besoins des personnes âgées hébergées en EHPAD et en résidences autonomie.

Concernant les résidences autonomie (nouvelle appellation des foyers-logements), le travail en réseau et en partenariat permet de réaliser des projets ouverts au public du quartier, ou de participer à des actions dans d’autres structures.

Quant aux EHPAD, ils proposent des animations qui prennent en compte les particularités des personnes accueillies.

Des activités créatives

La palette d’activités suggérées par ces établissements s’est donc étoffée et diversifiée. Il ne s’agit plus seulement de lutter contre l’ennui, mais de proposer des animations stimulantes. L’objectif est de développer la créativité, l’estime de soi, la communication.

Au-delà de ses problèmes de santé et de sa vulnérabilité, le résident est considéré comme une personne à part entière avec son histoire, son potentiel,  sa sensibilité.

Chaque structure accueillant des personnes âgées peut piocher dans un large panel de possibilités pour offrir celles qui répondront le mieux aux besoins de ses résidents. Entre chant choral, musicothérapie, peinture, activité manuelle, langue régionale, atelier mémoire, théâtre, ateliers d’écriture (entre autres), il y a l’embarras du choix.

Objectifs d’un atelier d’écriture en structure d’accueil

Les objectifs sont nombreux, et les bienfaits multiples. Ils peuvent se résumer en trois dimensions essentielles.

Gym des méninges et stimulation cognitive

L’ambition première est de stimuler les facultés intellectuelles et d’exploiter les ressources existantes. Il s’agit de faire fonctionner la mémoire et l’imagination, de faire travailler les capacités d’expression et la créativité.

L’effort d’attention, de concentration et de réflexion remet en circuit des fonctions neuronales de moins en moins sollicitées. Les cinq sens sont un support important pour convoquer l’imaginaire ou le souvenir. L’écoute d’une chanson, la lecture d’un poème, l’étude d’un tableau, sont autant d’outils qui réactivent les compétences enfouies en chacun.

Plaisir de la rencontre et socialisation

Atelier-ecriture-et-socialisationMême au milieu des autres, il n’est pas toujours facile de créer des liens et de communiquer. Certes, la plupart des résidents se retrouvent au moment du repas. Mais la salle peut être bruyante, et le brouhaha ambiant n’encourage pas forcément l’échange.

Toutes les activités proposées par l’établissement offrent un espace privilégié de convivialité, mais l’atelier d’écriture répond particulièrement à cet objectif de partage. Les thèmes du passé, de l’enfance et des souvenirs sont un support à l’écrit. Ils permettent dans un second temps, par la lecture au groupe, de se dévoiler, de se mettre en scène.

Ce retour à une époque commune favorise l’expression et les interactions. La vie de l’un fait écho à celle de l’autre, les échanges sont fructueux et s’alimentent de l’expérience de chacun.  Il est parfois même difficile de les interrompre !

Dans mon premier groupe, certaines participantes (je n’ai eu que des femmes) ont pu formuler qu’elles avaient beaucoup appris sur le parcours de leurs corésidentes. Elles vivaient sur le même lieu, se côtoyaient quotidiennement, sans connaître le métier de l’une ni l’épreuve traversée par l’autre.

Ces rencontres permettent de rompre l’isolement et la solitude, de créer parfois des liens forts. On s’attend, on passe prendre la voisine à son logement. Des affinités peuvent naître au fur et à mesure des séances.

L’expression des émotions

Une partie des exercices est basée sur le partage des souvenirs de son enfance et de sa vie. Évoquer des périodes heureuses ou confier des moments difficiles déclenche parfois des émotions fortes, qui n’ont pas souvent l’occasion de s’exprimer.

Mais l’atelier ne repose pas que sur un travail de mémoire et sur un registre nostalgique. Des consignes plus légères sont également proposées. Le rire se déploie, la bonne humeur gagne le groupe. On s’amuse, mais on peut aussi ne pas être d’accord et se contredire.

C’est par ailleurs un espace de liberté où l’on peut exprimer sa fantaisie, son originalité, sa singularité. Cette dimension peut être une vraie découverte, car la vie n’a pas forcément permis aux personnes de cette génération d’afficher cette part d’eux-mêmes.

La fonction d’animatrice d’ateliers d’écriture auprès des personnes âgées

L’animatrice (ou animateur… mais c’est plus rare !) devra énoncer et imposer les règles de fonctionnement du groupe. Elle est garante de l’attitude bienveillante et empathique des participants. Sa mission est également de veiller à créer une ambiance chaleureuse, faire en sorte que chacun écoute et respecte l’autre.

Elle doit aussi les aider à vaincre leurs appréhensions. Travailler sur l’écrit peut faire peur. Les résidents manifestent souvent des réticences, des inquiétudes, des doutes. Certains n’ont pratiquement pas repris la plume depuis le temps de l’école, hormis pour un courrier ou une carte de temps à autre.

Il faut donc poser le décor, et rappeler qu’il ne s’agit pas d’une compétition ni d’une évaluation.  Chacun arrive avec ce qu’il est, avec ses compétences et ses lacunes. Faire des fautes n’est pas un problème, ce n’est pas un lieu où elles seront sanctionnées.

Dans le cadre de sa mission, l’intervenante doit gérer le groupe pour que chaque participant puisse prendre sa place avec ses capacités et ses talents propres. Elle rappellera également l’obligation de discrétion de chacun,  afin que les confidences ne soient pas divulguées à l’extérieur.

 

Retrouver l’envie d’écrire, découvrir son potentiel créatif, réinvestir le plaisir de s’exprimer et de partager, apprendre à mieux connaître les autres. Les bienfaits d’un atelier d’écriture en structure d’accueil sont nombreux, et chacun pourra y trouver son bonheur. Certain(e)s peuvent même y prendre goût ! Il est alors possible (et conseillé) de prolonger l’activité, et de recopier en les étoffant les contenus réalisés pendant les séances. Exercice gratifiant et bénéfique, à pratiquer sans modération…